Pailladin d’ailleurs #10 – Virgil, à la recherche du Germain perdu

Ahhhhhhh l’Australie et ses espèces endémiques mortelles. En ouvrant le registre animalier du pays, on tombe sur des prédateurs de toute sorte allant du dingo qui vous broie les os avec ses mâchoires de chien errant bodybuildé, au le requin blanc qu’on ne présente plus, en passant par une flopée de les serpents et d’araignées (je vous invite à googler la red black qui semble avoir été dessiné pour être un super vilain de Marvel), mais en lettre rouge figure le plus dangereux de tous : le Valère Germain. Véritable tueur des surfaces, il aurait été importé de France à l’été 2023 par un nouveau miracle de la mondialisation. L’homme sévit durement dans le championnat local où aucun des défenseurs locaux semble n’avoir réussi à le museler. Constatez par vous-même : l’attaquant affiche un bilan de 11 buts en 20 matchs de A-League . C’est pour mieux documenter les ravages de la bête que Virgil a atterri en Australie, le 14 septembre dernier.

Notre pailladin en vadrouille plante d’emblée le décor, « je ne suis pas très bavard au téléphone, ma mère me le reproche d’ailleurs bien souvent ».  Mais à force d’efforts, on parvient tout de même à obtenir l’itinéraire du traqueur d’attaquant : « J’ai atterri à Melbourne, j’avais un ami là-bas qui nous a laissé son appartement pendant qu’il était en voyage de noces. Après, j’ai fait un peu la Tasmanie, mais maintenant, je suis dans le Western Australien, on travaille dans les vignobles avec ma copine, c’est une étape obligée pour valider notre visa et rester ici une année de plus ».

Depuis Busselton, ville de 15 000 habitants perdue à plus de 200 km de la grande ville locale Perth, il me livre ses constats alarmants sur le football local : « jouer au foot en Australie c’est très compliqué, ici ils sont obsédés par le rugby, le footy [sport australien ressemblant au rugby avec plus de jeu au pied et un stade ovale, ndlr], le rugby à 13, et même le cricket. Tu sens l’héritage fort de l’ancienne colonie anglaise. Pour te donner une idée de l’importance du foot, j’ai croisé un gamin dans le camping où je vis avec un ballon et qui me dit : ‘‘moi, je joue au foot’’. Je commence à parler avec lui, il ne connaissait ni Mbappe, ni Griezmann. »

Malgré les posters géants de Sam Kerr, star mondiale du football féminin, que l’on peut croiser çà et là, pour parler foot en Australie mieux vaut donc miser sur les étrangers. « Quand je suis arrivé à Melbourne, j’étais en auberge de jeunesse avec des italiens, des uruguayens, très vite, le football est revenu dans les conversations. En Tasmanie, aussi improbable que ça puisse être, j’ai bossé avec des népalais qui me disaient être pour le PSG. Il y a une grosse communauté grecque dans le pays aussi, dont le meilleur représentant est surement Ange Postecoglou ». Né en Grèce, l’actuel entraîneur de Tottenham a immigré en Australie à l’âge de 3 ans suite au coup d’état de 1967 avant de porter les couleurs de l’Australie a 4 reprises à la fin des années 80.

C’est bien beau tout ça mais ça nous ferait presque perdre la piste de Valère Germain. Pas d’inquiétudes, Virgil a justement fini par retrouver sa trace. C’était lors d’un match entre Melbourne City, pâle copie australienne de Manchester City, et le Mac Arthur FC. « Il y a eu 3-3, comme ça on pourrait croire que c’est un beau match mais ça ne valait pas mieux que du haut de tableau L2, maintien L1, un bon vieux Angers-Ajaccio quoi. L’ambiance est médiocre en plus, c’est très mère de famille avec enfants. Ça ne chante pas, ça applaudi parfois ». Une fois sur place, notre aventurier s’est tout de même hasardé à approcher Valère : « c’était difficile, ils menaient 3-1, ils se sont faits rattraper au score 3-3. Il y avait beaucoup de déception.  Il était avec sa famille, je ne voulais pas l’embêter ». Et pourtant, notre Pailladin va réussir à capturer l’animal blessé … en selfie. « Il a été très sympa franchement, c’était cool, bien que bref ». Et si on s’était trompé, qu’à l’image du requin, qui ne tue en moyenne « que » 6 personnes dans le monde, Valère Germain n’était seulement que victime de sa réputation. D’ailleurs, en parlant avec lui, Virgil semble plus marqué par l’efficacité de la buvette en self-service du stade de Melbourne que par la prestation de l’ancien Héraultais. « Franchement, je n’ai pas trouvé Valère exceptionnel sur ce match, je ne l’ai pas vu meilleur qu’à Montpellier. Son équipe a évolué dans 4-3-3 pas top, après ils ont quelques bons joueurs dont un sud-américain Ulises Dávila ».

Je m’ose alors à évacuer le sujet Valère Germain, et j’apprends que d’autres français gambadent en liberté en Australie. « Parmi les anciens de Ligue 1, il y a Hamza Sakhi [avant de rejoindre Ajaccio au mercato hivernal dernier, ndlr], Damien Da Silva, Marcelo, Zinédine Machach. Mais je le répète le niveau est très bas. Je ne sais pas s’il y a tant de bons coups à faire. Même si par exemple là tu as le Bayern qui est allé recruter un jeune de 18 ans [Nestory Irankunda, ndlr] à Adelaïde, je l’ai vu un peu joué parce qu’ici si tu veux voir du foot, vu les fuseaux horaires, c’est de la A-League. Il est pas mal, mais de-là à jouer au Bayern ».

Voilà qui nous amène au sujet inévitable de la chronique « comment fait-on pour suivre le MHSC en Australie ? ». « Bon le premier truc à savoir, c’est que, du fait, des chaleurs intenses ici, 35-37°, on se lève très tôt le matin vers 4h. Et on se fait quand même tuer parce que le problème c’est que la couche d’ozone n’est pas bien épaisse par ici. Donc, j’ai pris l’habitude de me lever tôt. A Melbourne et en Tasmanie, il y a près de 10h de décalage horaire. Donc un match à 21h, ça te le me à 7h le lendemain en Océanie. Et c’est jouable. Maintenant, j’ai plus que 7h de décalage donc c’est encore plus facile puisque la majorité de nos matchs sont à 15H, ça fait du 22h ». Certes, ça peut faire se coucher tard, mais quand on aime on ne compte pas et en discutant avec Virgil, on se rend vite compte que le bonhomme est un passionné. Du genre à passer ses journées sur football manager et à s’hasarder sur des matchs de D1 grecque ou de D1 norvégienne.

Natif de l’Est de la France, c’est pourtant presque par hasard qu’il est tombé amoureux de la Paillade. « Je suis né en 1992, je suis arrivé à Montpellier en 1999. Au fond, je suis devenu supporter du MHSC parce que j’ai déménagé ici, si ma mère avait déménagé à Nantes ou Strasbourg, j’aurais sans aucun doutes supporté ces clubs. Je me souviens très bien de mon premier match, c’était Montpellier – Bordeaux, saison 2001-2002, un 0-0, tout pourri. Tu vois en t’en parlant j’ai des flashs, les Bamago, Aliou Cissé, Fugier. Je me souviens d’un 3-0 contre Nantes [journée 33, saison 2001-2002]. Ce qui est fou, c’est que ni ma mère, ni mon père, ni même mon grand frère sont fans de foot. Du coup, c’était ma mère qui m’amenait au stade avant que je puisse y aller tout seul avec les copains du foot. » C’est avec une nostalgie proustienne qu’il évoque aussi l’ancien Grammont « on avait une proximité avec les joueurs unique, j’étais assis à même la pelouse, je discutais avec Collin, avec Courbis. Ils étaient très sympas, humains. Courbis, putain, j’allais voir plein d’entraînement rien que pour son show. Le nouveau centre maintenant ça n’a plus rien à voir, tout est barricadé. Après, c’est normal tu t’es professionnalisé, et les gens sont de plus en plus cons, tu pourrais avoir des dérives ».

Retour à la saison 2023/2024, au moment de notre appel, Montpellier vient de sombrer face à Nice (1-4) en Coupe, alors je ne résiste pas à lui demander son point de vue sur le sportif. « Côté valeur, Montpellier c’est un club qui me correspond sur plein de points, sur le côté familial, mais à la fois ça nous bloque. Je pense qu’il faudrait s’ouvrir. On a essayé avec ODO et ça n’a pas marché. Ce dont j’ai de plus en plus de mal c’est le côté club de fils de : Tchato, Delaye, les fils Dzodic ou Hilton sont au centre. Ndaye, Leroy même si leurs pères n’ont pas joué à Montpellier, ce sont d’anciens pro. Quand je vois des équipes qui font venir des entraîneurs étrangers comme Farioli, Still, Conceição, Favre, je me dis que c’est triste que l’esprit paillade nous pousse à miser sur des coachs qui sont des meneurs d’hommes. Il n’y a qu’à voir les rumeurs qui reviennent les Antonetti, Laurey. En fait, ODO a été très critiqué mais il faut rappeler qu’il avait perdu Delort et Laborde. J’aimerais bien un mec comme David Bettoni qui était l’adjoint de Zidane au Real ou Habib Beye. Lens a réussi avec un Franck Haise, pourquoi pas nous ».

Histoire de terminer sur une note plus positive, je demande à cet ex-serveur dans un bar dansant incontournable de Montpellier, s’il a quelques anecdotes croustillantes sur nos joueurs pailladins en soirée. « Franchement, quand je bossais en tant que serveur pas tant que ça. Mais quand je sortais, plus jeune, je croisais régulièrement les Lacombe, Montaño, Costa, Spahić. Lui, il était pote avec tous les ex-yougo qui jouaient au hand à Montpellier. Parfois, je les croisais en boîte très éméchés et pourtant ils restaient performants sur le terrain, deux jours plus tard à La Mosson, c’était fou ». A se demander, si ce n’est pas une petite virée en boite qui manque à Akor Adams pour retrouver le chemin des filets.

Vous pouvez accéder aux 9 premiers épisodes à travers cette carte interactive ou dans la section du site dédiée à la chronique que retrouverez au lien ci-après : Pailladins d’ailleurs.

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